• FN, UMP, PS, gardiens du capitalisme

    « Sous le régime capitaliste, l'individu est enfoncé dans la matière jusqu'au coeur, sous l'écrasement économique et les obsessions militaires. Je veux construire une cité d'espérance où l'homme s'aperçoit que les étoiles existent. » - Jean Jaurès

     

    I Le manque d'argent

    D’où vient l’argent (la monnaie) ? Y avez-vous déjà réfléchi ?

    Est-ce qu’il tombe des arbres ? Est-ce qu’il pousse dans les champs ? Non évidemment …

    Pendant longtemps, on le créait à partir de métaux plus ou moins précieux, comme l’or, l’argent ou le cuivre. Aujourd’hui, ayant bien compris l’intérêt de sa dématérialisation, et possédant la technologie qui la rend possible (l’informatique), on le crée à partir de rien, par des simples inscriptions comptables …

    Alors quand il s’agit de financer des projets collectifs comment peut-il manquer ?

    Que l’on puisse manquer de nourriture, que l’on puisse manquer de matières premières, que l’on puisse manquer de temps, que l’on puisse manquer de main-d’œuvre, que l’on puisse manquer de savoir-faire et de compétences, que l’on puisse manquer de solutions à des problèmes techniques, tous ces manques-là sont concevables car ils sont bornés par des limites et des contraintes finies et bien réelles :

    • La quantité de nourriture dépend de la fertilité des terres que l’on cultive et des animaux que l’on élève.
    • Nos matières premières sont limitées par les ressources que nous offre la nature sur l’ensemble de notre territoire. Au pire nous pouvons échanger celles dont nous disposons avec celles dont nous avons besoin avec d’autres peuples.
    • Les jours sont limités par le temps que met notre planète à tourner sur elle-même, soit 24h.
    •  La quantité de main-d’œuvre disponible dépend de la quantité de notre population et du  nombre d’entre nous en âge de travailler.
    •  Notre savoir-faire est limité par le savoir et les compétences que nous avons acquis et transmis à travers les générations.
    • Les solutions aux problèmes techniques dépendent de notre savoir, de nos technologies, donc de nos recherches et de notre intelligence.

     

    •  Mais la monnaie ? Qu’est-ce qui la limite si nous la créons à partir de rien ? Sa quantité dépend de notre seule volonté. Bien sûr nous n’avons pas intérêt à en créer plus que nécessaire, mais nos besoins sont-ils tous comblés ?

    Quand on a un salaire effectivement, on en dispose en quantité très limitée, on peut en manquer, c’est logique. Mais à l’échelle d’une communauté politique et souveraine qui crée la monnaie ? Une société, pour financer des projets collectifs, ne peut pas en manquer, c’est totalement absurde …

    C’est ce paradigme du manque d’argent qu’il faut absolument briser dans l’esprit des gens.

    Une communauté politique, composée de 65 millions de personnes hautement éduquées, occupant un vaste territoire, si riche, si fertile, et bénéficiant d’un climat si idéal que nous serons bientôt le pays le plus peuplé du continent européen, forte de 2000 ans d’histoire et d’accumulation de connaissances et de savoir-faire à la pointe de l’humanité toute entière, une telle civilisation devrait prendre conscience de ses forces et de ses possibilités, mais aussi de ses vraies limites !

    Ce paradigme nous pousse à croire que nous sommes impuissants, que nos marges de manœuvre sont limitées par je ne sais quel manque d’argent, il nous pousse jusqu’à intégrer l’idée qu’il ne reste plus d’autre choix que de faire des sacrifices pour s’en sortir. Mais se sortir de quoi si ce n’est d’une illusion collective qui a des conséquences néfastes malheureusement bien réelles ???

    Une illusion collective soigneusement entretenue  par  certains qui prospèrent en exploitant toujours plus ceux qui justement sont convaincus que nous n’avons pas d’autre choix que d’accepter de renoncer à nos espoirs de progrès et d’accepter toutes les régressions qu’ils nous imposent.

    C’est justement ce qu’exprime si bien la phrase prononcée par Jean Jaurès : « enfoncé dans la matière jusqu’au cœur, sous l’écrasement économique »…

    Des vraies limites il y en a pourtant, par exemple la quantité finie des matières premières disponibles sur la Terre, tel que le pétrole qui va réellement finir par manquer au rythme où nous le consommons, ou la fertilité non infinie de nos sols si nous les polluons de plus en plus et empêchons, par notre stupidité et nos négligences, le cycle de la vie de se renouveler.

    Mais si nous avons besoin collectivement de construire des logements, des écoles, des hôpitaux, ou encore plus fou, si nous voulons explorer l’espace et observer de plus près les étoiles, du moment que l’on y trouve un intérêt collectif, que l’on dispose des matières premières nécessaires,  de la main-d’œuvre suffisamment qualifiée,  ou enfin du savoir-faire et des techniques requises, alors rien ne devrait nous en empêcher, certainement pas de l’argent que l’on crée !

    D’ailleurs à la base la monnaie est sensée être une innovation ingénieuse par rapport au troc pour faciliter (fluidifier) la réalisation des projets et des échanges économiques, si elle finit par les restreindre ou les empêcher, c’est qu’il y a un problème : Pas assez de monnaie en circulation ou pire, qu’elle ne circule pas comme il faut (ex : quand une minorité de personnes en accumulent une trop grosse quantité au point qu’elle finit par manquer pour tous les autres) …

     

    II La société du progrès humain

    « Je veux construire une cité d'espérance où l'homme s'aperçoit que les étoiles existent. » 

    C’est le projet de société que devrait défendre toute force de progrès : Se libérer de notre condition de précarité naturelle et de nos besoins matériels pour nous concentrer à l’amélioration de nos vies, à la réalisation de nos rêves et à la recherche de réponses à nos interrogations existentielles.

    Aujourd’hui, en France malheureusement, ces forces politiques se comptent sur les doigts de la main, la plus importante étant le Front de gauche.

    Le Parti socialiste, la force politique qui portait historiquement l’idée du progrès initiée par Jaurès, a depuis une trentaine d’années finit lui aussi par se convaincre du paradigme du manque d’argent en renonçant à dépasser le capitalisme et en intégrant des pans entiers de l’idéologie néolibérale.

    Parce qu’elle est libérée ainsi de ces illusions, de ces peurs et de ces fausses contraintes, cette société du progrès humain fonctionne alors au maximum de ses possibilités.

    Elle offre non seulement des buts collectifs ambitieux et porteurs d’espoir, capables de rapprocher tous ses membres les uns des autres, peu importe leurs origines, car ils donnent à tout le monde un sens à leur vie et permettent d’améliorer nos vies à tous et de réaliser les rêves que nous partageons.

    Mais elle donne aussi à chacun une vraie place, anciens, comme nouveaux-nés, comme immigrés. Plus personne n’est exclus à cause de ces fausses limites et contraintes, tout le monde participe enfin à l’effort collectif et se sent intégré et utile car cela nous rend plus forts, car cela nous permet d’accomplir de plus grandes choses  enfin fondées sur la justice et l’égalité, car tout le monde en bénéficie.

    C’est la magie de la coopération humaine.

    C’est grâce à notre capacité à coopérer permise par les incroyables et nombreuses aptitudes sociales dont nous a doté la nature que l’humanité est sortie de la précarité et que de nombreuses civilisations se sont développées.

    Car oui, tout comme jadis certains chassaient des animaux ou cueillaient des fruits pour nourrir toute la tribu, les autres pouvant ainsi construire des outils ou élever et prendre soin des enfants, aujourd’hui nos sociétés modernes sont de gigantesques et bien plus complexes coopérations humaines, d’un côté des paysans produisent la nourriture dont tout le monde a besoin pour vivre et déchargés de cette tâche, cela permet ainsi à d’autres personnes d’occuper leur temps et de travailler à construire des fusées qu’on envoie dans l’espace.

    Nous sommes fous de l’avoir oublié.

     

    III Le chômage et la dette

    Le chômage, conséquence directe du paradigme du manque d’argent, est lui aussi une absurdité. En 10000 ans d’Histoire, nous sommes les premières sociétés humaines, et ce depuis 40 ans à peine, qui ne trouvons pas durablement moyen d’occuper et de trouver du travail à nos membres, comme si les besoins individuels ou collectifs et le travail pour les satisfaire manquaient eux aussi, encore un autre aspect de cette illusion collective, tout autant entretenu avec intérêt par ceux qui tirent profit à nous voir rallonger les listes de postulants à leurs offres d’emplois sous-payés et de plus en plus précaires …

    Rappelez-vous pendant les élections présidentielles comment, se croyant plus malins et plus intelligents que nous, gens du commun, en se faisant eux-mêmes les premiers zélotes de ce paradigme, nos chers journalistes ont pris pour habitude de harceler les représentants politiques sur le « coût » de leur programme, sans jamais s’interroger sur les bénéfices qu’ils apporteraient, qu’ils soient sociaux ou économiques, ces ânes.

    Ainsi convaincus que nous manquons tellement d’argent, celui qui à leurs yeux apparaitra le plus sérieux et le plus responsable sera celui qui ne propose aucun progrès et le plus de sacrifices … Très intelligent n’est- ce pas ? Enfin tout dépend du point de vue. C’est en quelque sorte très intelligent de la part de ceux qui justement ne veulent surtout pas le moindre changement à part des sacrifices de tous les autres pour leur profit.

    Quand on comprend l’absurdité de cette croyance collective, on « apprécie » d’autant mieux la façon dont notre société marche sur la tête en poussant jusqu’à son paroxysme ce délire. C’est ainsi qu’une construction comptable parfaitement arbitraire comme la dette publique (car construite artificiellement par des emprunts absolument non nécessaires à des agents privés, des banques bien souvent, relevant donc totalement de l’escroquerie, contre des taux d’intérêts parfaitement arbitraires eux aussi, tout aussi injustifiés et parfois même carrément usuraires) devient l’incarnation de cette illusion. Ce qui permet aux gens d’encore mieux s’en convaincre, ou du moins plus précisément ce qui permet à ceux qui les exploitent d’encore mieux les en convaincre.

    Ainsi rembourser cette dette et réduire les déficits publics devient désormais l’alpha et l’oméga de toute politique publique. Plus question de s’apercevoir que les étoiles existent, n’existe plus que cette dette qu’il faut À TOUT PRIX (même au prix du sang) rembourser et ces déficits qu’il faut À TOUT PRIX réduire, ce qui justifie tous les sacrifices et donc toutes les régressions sociales ou démocratiques. Comme par hasard, justement celles qui vont dans l’intérêt des exploiteurs : moins de salaires, moins de dépenses sociales, donc moins d’impôts etc.  et évidemment moins d’interventions des citoyens (pourtant souverains en démocratie) dans leurs affaires, au contraire plus de libertés pour nous exploiter et de pouvoirs pour eux-mêmes !

    Rousseau dans son œuvre « Du contrat social » expliquait que la seule source de légitimité était la volonté du peuple. Selon ce nouveau paradigme, la seule source de légitimité c’est la dette et donc la « volonté des marchés financiers et des agences de notation » …

    Des gens sensés feraient passer l’humain d’abord, avant la comptabilité, et donc annuleraient tout simplement la dette, en tout cas au moins la partie jugée illégitime. D’ailleurs c’est quotidiennement ce que l’on fait pour les individus ou même les entreprises trop endettés. Car de toute façon, la comptabilité dépend tellement de décisions arbitraires qu’elle finit forcément un jour ou l’autre par ne plus représenter aucune réalité. Il faut être fou pour élever cette comptabilité au-dessus des droits humains. Mais « volonté des marchés financiers et des agences de notation » oblige, désormais c’est la dette d’abord, et l’humain on nous promet que l’on verra plus tard.

    Remarquez qu’il y a 15 ans à peine, le prétexte invoqué était la compétitivité, comme quoi ils innovent sans arrêt, ce n’était surement pas assez convaincant, bien qu’on entende l’argument encore de temps en temps, disons que cela s’additionne.

    Mais bon, quand on sait qu’on nous promettait déjà l’humain plus tard après avoir œuvré pour la compétitivité … Cela devrait en réveiller plus d’un !

     

    IV Le rapport de force idéologique en France

    Et c’est valable du Front national jusqu’au Parti socialiste ! Là-dessus, au moins, ils sont tous d’accord !

    • Le Front national trouve ainsi prétexte à sa xénophobie, fustigeant le « coût de l’immigration pour la France », virer les immigrés devient ainsi nécessaire pour rééquilibrer les comptes publics et rembourser la dette… Comme on dit « Les cons ça ose tout » …
    • L’UMP trouve prétexte pour ses politiques idéologiques de classe sociale, servant les intérêts des plus riches, et prétexte aux revendications patronales et de leurs amis financiers.
    • Le PS, totalement empêtré dans sa logique d’alternance avec l’UMP, et voulant apparaître ainsi comme « de gauche », mais « responsable » , fait ainsi de la réduction des déficits publics le préalable à toute politique progressiste ( autant dire qu’on n’en verra jamais la couleur ), et convaincu qu’il n’y a plus d’argent n’est de toute façon plus capable que de proposer des « progrès » qui ne suffisent même plus à compenser les régressions précédemment mises en œuvre par la droite, un peu comme s’ils leur laissaient le soin de faire le sale boulot et d’endosser le mauvais rôle à leur place ( ex: les retraites ou les traités européens ).

    À noter que dans d’autres pays comme la Grèce, le PS a bien été obligé d’endosser lui-même le mauvais rôle.

    (Au sens de ce paradigme, comme je l’ai expliqué plus haut, le plus responsable est dans leur logique celui qui ne propose aucun progrès et propose le plus de sacrifices, on voit donc quelle pente a prise le PS en voulant se faire plus responsable que la droite).

    Voilà, grosso modo l’essentiel du paysage politique français si l’on en croit les dernières élections, ces trois partis ayant reçu le soutien au total de 26 447 760 Français …

    Il y a encore tant de gens à qui il faut ouvrir les yeux que l’on peut facilement désespérer. Mais en a-t-on le droit ou la possibilité ?

    La société voulue par Jaurès est plus que jamais nécessaire ! Les étoiles existent, elles sont brillantes, superbement belles et méritent d’être observées de plus près.

    AGORAVOX



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